En révoquant l’édit de Nantes en 1685, Louis XIV interdit le protestantisme. Les familles qui ne quittent pas la France pour les pays dits du Refuge (Suisse, Allemagne, Hollande, Angleterre, Amérique du Nord) se voient contraints de pratiquer leur religion clandestinement. Les cultes se font la plupart du temps dans les maisons, autour du chef de famille qui réunit les siens pour lire un passage de la Bible et prier. S’ils sont surpris, les peines encourues sont la mort pour les pasteurs, la prison pour les femmes et la condamnation aux galères pour les hommes. Il était donc essentiel de dissimuler la Bible, dont la première page était même arrachée pour rendre le livre non identifiable par les dragons illettrés, ces derniers ayant seulement appris à en reconnaître la page de titre.

Ce miroir, en laiton repoussé sur âme de bois, est dit « huguenot » car il constitue une cachette idéale. C’est à partir de la fin du XVIIe siècle, avec la création de la Manufacture royale des Glaces, que le miroir cesse d’être un objet de luxe et se généralise. Sa présence au sein d’une maison n’avait donc rien de surprenant. Si les familles les plus humbles, n’ayant d’autre alternative, dissimulaient généralement la Bible sous la plaque de la cheminée, ici les propriétaires du miroir ont simplement tiré parti de sa forme creuse, fermée par une fine cloison de bois, pour créer une cache. Doté d’un double-fond, il permet de dissimuler le livre interdit au yeux des soldats du roi. Ce type de miroir rectangulaire à double encadrement garni de parecloses est très à la mode à partir du règne de Louis XIV et ce jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Le fronton qui le surmonte, présentant un enchevêtrement de rinceaux entourant un vase fleuri, correspond au style en vogue durant la Régence (1715-1723).

Fiche d’identité :


XVIIIe siècle
Laiton, bois, verre
H. 60 cm ; L. 34,5 cm ; Ep. 4,5 cm
Achat, 2002
N° inv. 2002-4-1