Cette estampe, anonyme et non datée, présente trois scènes distinctes. La scène principale représente une assemblée de personnages au profil simiesque, entourant un personnage central, le duc Charles de Mayenne, devenu chef de la Ligue après l’assassinat de son frère Henri de Guise en 1588. Il est figuré présidant la session des États généraux de 1593, visant à résoudre la crise liée à la succession au trône du roi Henri III, assassiné en 1589. Henri de Navarre, héritier désigné, refusant d’abjurer sa foi protestante, ces « États de la Ligue » devaient aboutir à l’élection d’un roi catholique. Au-dessus du duc de Mayenne, héritier autoproclamé, dominant l’ensemble de la composition, figure un portrait de l’Infante d’Espagne, Isabelle-Claire-Eugénie de Habsbourg. Petite-fille d’Henri II de France, descendante directe des Valois, elle est également une des prétendantes au trône. De part et d’autre de la scène sont représentés les Seize, chefs de la Ligue, et les représentants de la noblesse française. Au centre apparaissent deux musiciens, les députés de villes et quelques gardes.

La composition tripartite de cette œuvre est soulignée par le décor architectural au sein duquel elle s’inscrit. La symétrie parfaite de la scène centrale, soulignée par la perspective, s’oppose aux scènes latérales, à la composition plus libre. A droite, une curieuse scène de rue représente un âne monté à l’envers par un homme nu se fustigeant avec des verges. Elle évoque un fait réel : la condamnation du propriétaire d’un âne par la Ligue pour avoir juré en public tandis qu’il tentait de faire avancer son animal. A gauche, un groupe de personnages armés de marteaux entoure l’enclume d’une forge sur laquelle repose un personnage couronné démembré. Ici le démembrement n’évoque pas un supplice, mais un échec : celui des membres du Conseil des Seize tentant de forger un roi à leur convenance.

Intitulée La Singerie des États de la Ligue, an 1593, cette xyloglyphie (gravure sur bois de fil) est le pastiche d’une estampe tirée de la Satyre Ménippée, un des plus célèbres pamphlets du XVIe siècle. Ce libelle, paru en 1593, attaque et tourne en ridicule les chefs de la Ligue et ses partisans afin qu’Henri IV apparaisse sans conteste comme le roi légitime. En 1595, Jean de la Taille publie un petit opuscule intitulé Histoire abrégée des singeries de la Ligue, qui sera par la suite souvent imprimé à la fin des nombreuses rééditions de la Satyre Ménippée. Cette estampe, pour être une copie de la Figure des États de la Ligue de la Satyre Ménippée, va plus loin dans la caricature que la gravure originale en représentant les ligueurs sous les traits de singes. C’est là un parfait exemple des nombreuses images satiriques produites et diffusées durant les guerres de religion. Il faudra ensuite attendre le XIXe siècle pour retrouver un ensemble aussi conséquent de caricatures politiques.

Fiche d’identité :

Anonyme
s.d
Xylographie
H. 19,9 cm ; L. 26,4 cm
Achat, 2008
[inventaire en cours]